Je n'aime pas tellement les fictions autobiographiques ou biographiques. Ou du moins, ça ne me fait ni chaud ni froid qu'une histoire soit 'vraie' ou 'fausse'. Ou plutôt, je sais comme tout le monde qu'une histoire vraie n'est jamais vraie et qu'une histoire fausse n'est jamais fausse. Et aussi, entre parenthèses, que beaucoup d''histoires vraies' sont surtout spectaculairement soporifiques.
Etant donné que ma vie n'est déjà pas super fascinante en tant que telle, je n'ai jamais ressenti le besoin impérieux d'aller ennuyer toute la galaxie avec les interrogations existentielles semi-caféinées d'une jeune fille de la bourgeoisie intellectuelle parisienne incongrument férue de littérature jeunesse. Cela dit, c'est un sujet de débat intéressant: est-ce une plus-value d'écrire des histoires vraies? Peut-on écrire des histoires qui 'sonnent vrai' sur quelque chose que l'on n'a jamais vécu?
Ma réponse à la première question est un ferme 'non', et à la seconde un 'oui' encore plus décidé, mais c'est bien entendu ouvert à toutes les discussions.
Ces questions me viennent parce que je suis en ce moment en train d'écrire un roman pour ados qui est très très très fortement inspiré d'une expérience réelle. En fait, c'est le calque de cette expérience. Enfin non, pas vraiment un calque - un déplacement. Parce que je ne suis pas une ado de 15 ans vivant dans une petite ville de province. Ses sentiments et ses idées ne sont pas les mêmes que les miens. Je dois les adapter, les remodeler. Mais je pense qu'il y a une certaine aisance de l'écriture, une conviction plus grande, moins de tâtonnements, peut-être, quand on transfère de manière aussi intense de 'vraies' impressions dans une oeuvre de fiction.
Cette confortable facilité me laisse à penser que c'est peut-être la raison pour laquelle tant de premiers romans sont semi-autobiographiques.
Il y en a eu un autre. Il y a trois ans, j'ai écrit et illustré un album pour enfants, L'année du homard, qui, je pense, ne verra jamais le jour sous forme de livre publié, car il a été rejeté par suffisamment de maisons d'éditions. Mais tous les commentaires encourageants, voire touchants, me font penser qu'il y a peut-être quelque chose là-dedans qui 'résonne' un peu 'vrai'.
Et pourtant tout est faux: c'est l'histoire d'un monstre qui vient s'installer dans une famille. Dire que c'est vrai est une imposture. Mais dire que c'est faux n'est pas vrai, car je l'ai écrit et illustré en ayant constamment à l'esprit l'année où ma maman a eu un cancer et en a guéri, il y a de cela presque dix ans.
Peut-être que ça en fait un album un peu 'à part' dans ce que j'ai écrit. Mais peut-être pas. Quelqu'un qui n'a pas eu cette expérience aurait très bien pu l'écrire. Et quelqu'un qui a connu ça pourrait très bien dire que ce n'est pas du tout 'la vérité'.
Bref, vu que cet album ne verra jamais le jour dans les librairies, je l'ai mis en ligne et vous pouvez le voir en cliquant ici. (Soyez cool, c'est mon histoire, ne la reproduisez pas sans mon autorisation.)
A vous de voir si c'est une histoire vraie ou fausse.
Et vous, vous écrivez des histoires 'vraies'?
Super intéressant, Clem. Il me semble que pour l'auteur, le primordial serait de ne pas laisser passer pour "vraie" une histoire "fausse", en utilisant un "je" un peu trouble, sur certains sujets graves.
RépondreSupprimerLà dessus, je retourne écrire mon histoire fausse :-)
ah! oui, intéressant... donc l'auteur et le narrateur doivent être clairement distincts l'un de l'autre en cas de 'fiction'...
RépondreSupprimerMoi j'ai tendance à dire que je n'écris que des histoires vraies. Même quand ça ne parle que de fantômes ou de fées et que ça se passe sur une autre planète. C'est vrai que les personnages n'ont pas réellement existé et que ce qu'ils vivent ne pourrait pas arriver en réalité. Mais si leurs sentiments sont de vrais sentiments (que j'ai pu ressentir à un moment de ma vie), pour moi tout est VRAI !
RépondreSupprimerEt j'aime beaucoup ton histoire de Homard. Je la trouve très émouvante... très vraie.