jeudi 10 novembre 2011

Non aux excuses! N°3: Je suis nul/le!

Meuh non voyons! Allez, un bisou.

Se trouver nul la plupart du temps est un signe de bonne santé. On se trouve tous nuls. J'aurais plutôt tendance à m'inquiéter pour ceux qui ne se trouvent jamais nuls.

Cette excuse-là arrive généralement aux alentours du premier tiers du roman qu'on est en train d'écrire. Tout a l'air d'aller bien, et tout à coup, tu ne sais pas d'où ça vient ni comment, mais une voix dans ta tête te dit 'C'EST NUL C'EST POURRI HAHAHA PAUVRE NULLE T'ES VRAIMENT NULLE ET CE QUE TU ECRIS EST PITOYABLE'. Et toi tu essaies d'argumenter: 'Ah bon t'es sûre mais quand même, là regarde c'est pas mal ce paragraphe...' et la voix répond: 'C'est tout simplement nullissime,' et tu dis 'Mais l'idée de départ n'était pas mauvaise' et la voix répond: 'Si je rencontrais cette idée au détour d'un sentier je la ferais écarteler, guillotiner et dévorer par des ours polaires pour crime contre l'Art.'

De toutes les excuses, c'est sans doute la meilleure (et donc la plus menaçante) parce qu'elle est dangereusement sincère. On peut se prendre en main pour trouver du temps et des idées, mais se convaincre qu'on n'est pas aussi nul qu'on le pense revient à se mettre devant un miroir pour essayer de se convaincre qu'on n'est pas aussi moche qu'on le pense.

Ce qui est cool, le moyen de se débarrasser de cette excuse est le même que le résultat qu'on vise en s'en débarrassant. Parce que le meilleur remède anti-je-suis-trop-nul/le-comme-écrivain, c'est d'écrire. Plus on écrit, plus on gagne en assurance – pas en assurance que c'est bien, mais en assurance qu'au moins on arrive à écrire de mieux en mieux, de plus en plus facilement, avec de plus en plus d'idées.

Un bon moyen de combattre la petite voix, c'est d'imaginer un architecte regarder son bâtiment en construction en se disant 'Qu'est-ce que je suis nul! Allez, on arrête tout.' Absurde, évidemment. On ne peut pas juger d'un bâtiment en construction, parce qu'un bâtiment en construction ne remplit pas encore sa fonction finale, c'est-à-dire d'être un endroit joli où on peut vivre. L'électricité ne fonctionne pas encore. Les murs ne sont pas encore peints. Il manque les vitres aux fenêtres.

Je ne vois pas pourquoi on aurait des exigences vis-à-vis d'un livre en cours d'écriture qu'on n'a pas vis-à-vis d'un bâtiment en construction.

Au lieu d'essayer de juger de son écriture (un exercice totalement subjectif), il faut se reporter sur des données objectives. Ne pas se demander: 'est-ce que c'est nul?', mais plutôt: 'Combien de pages aujourd'hui? Qu'est-ce qu'il me reste à faire? Quel est le thème central du livre? Que va devenir ce personnage? Comment développer cette idée?'

Et, ce faisant, se concentrer sur le processus d'écriture, pas sur ce que la partie maniaco-dépressive de notre cerveau essaie de nous susurrer.

Exercice anti-excuse: Se forcer à écrire cinq pages d'un texte sans relire, sans effacer, et en réfléchissant seulement aux éléments objectifs à développer. Ranger dans un tiroir sans regarder. Ressortir dans deux semaines. Juger.

Et si vraiment, véritablement, honnêtement, franchement et irrémédiablement, il t'est absolument impossible de ne pas te trouver nul, alors mon pote, à mon avis c'est un blog de psychanalyse que tu devrais lire au lieu du mien.

Samedi, excuse numéro quatre: Je ne serai jamais publié/e!

3 commentaires:

  1. ahhhhhh ! J'aime ça !! Je sens que je n'ai pas fini de le lire et le relire ce post ! Encore merci !

    RépondreSupprimer
  2. ahah j'adore ! surtout le "Et toi tu essaies d'argumenter: 'Ah bon t'es sûre mais quand même, là regarde c'est pas mal ce paragraphe...'" :-D Tellement VRAI O_o

    RépondreSupprimer