mercredi 20 mars 2013

V comme Vieillesse

Un petit bout de grand classique pour commencer?


Le vieil homme et l'enfant, Claude Berri

Voili voilo. Et maintenant je vous laisse, car tout ce que je voulais raconter est contenu dans cette vidéo. 

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Bon, allez, ok, un peu d'explication quand même. 

La présentation de la vieillesse en littérature jeunesse - du troisième âge, des grands-parents, des vieillards, des personnes âgées, appelez-ça comme vous voulez - a un certain nombre de caractéristiques plus ou moins résumées dans ce court extrait: entre autres, la transgression des normes adultes, la complicité avec l'enfant, le jeu, la mort et la maladie, la sagesse.

Le 'vieux' est, comme l'enfant, un Autre de l'adulte. Vous vous souvenez de l'article sur l'enfance symbolique, et de celui sur l'oppression? La vieillesse, comme l'enfance, est une catégorie symbolique que l'adulte surcharge de valeurs, de peurs, de croyances; dans laquelle il expulse ce qu'il ne veut pas être. 

Encore une fois, la temporalité joue un rôle essentiel. L'enfant, c'est ce que l'adulte ne veut plus être; le vieux, c'est ce qu'il ne veut pas encore être. Les deux partagent beaucoup de traits de cet espace 'non-adulte', cet espace 'par-opposition-à-l'adulte': l'enfant comme le vieux sont pensés comme non-travaillants, non-sexuels, non-socialisés, non-responsables, non-rationnels, etc.

Où est le problème?
Si le vieux et l'enfant sont des navigateurs d'un espace essentiellement adulte, cela veut dire qu'ils en sont à la fois les usagers et les transgresseurs potentiels; et puisqu'ils sont ensemble dans cette galère, ils peuvent être extrêmement complices.

Et c'est ce qu'on voit beaucoup en littérature jeunesse: des grands-parents et des petits-enfants qui contournent le règlement des adultes (ici, Michel Simon donne de l'alcool et du tabac au gamin), qui profitent de la déresponsabilisation qui leur est accordée pour parfaire 'l'éducation' de l'enfant - enfin, une certaine forme d'éducation: un apprentissage de la transgression. 
'Déjà, Babar, tu te fringues, ok?'

Bien sûr, la sagesse est aussi un attribut très important de la vieillesse. Les personnes âgées en littérature jeunesse sont souvent des initiateurs, en vertu de leur expérience et connaissances accumulées qui les rendent plus sages. Mais cette sagesse va souvent à l'encontre des désirs des adultes de l'histoire. D'Obi-Wan Kenobi à Dumbledore et à Grand-Mère Feuillage et Panoramix,  les vieux sages sont ceux dont l'establishment adulte aimerait bien pouvoir se débarrasser, parce qu'ils donnent un peu trop de pouvoir à l'enfant en l'initiant et en l'aidant ainsi...

Et c'est toute l'ironie de ces livres pour enfants qui présentent une amitié, une complicité extrêmes entre jeunesse et vieillesse - une relation transgressive par excellence, ludique, jouissive, initiatique, anti-adultes -... et qui, pour finir... eh bien, se débarrassent simplement de la personne âgée. Parce que oui, un vieux, ça meurt. Ca meurt beaucoup, en littérature jeunesse...

Ca meurt dans les albums...

Ca meurt dans les livres pour enfants... (Harry Potter, ill.Mary Grandpre)

Ca meurt dans les livres pour ados...

Et qu'est-ce qu'il arrive à la jeunesse quand la vieillesse meurt?

Eh ben oui, elle se retrouve toute seule face à l'adulte.

Le 'vieux' en littérature jeunesse est un motif complexe, une sorte de jouet entre les mains de l'adulte caché. D'un côté, c'est un être sage, qui enseigne à l'enfant la 'vraie' vie, qui l'aide à subvertir les codes des adultes. De l'autre, c'est un être immensément vulnérable, affaibli, hors du système, qui peut mourir à n'importe quel moment, laissant l'enfant choqué et sans défense.

Mais l'enfant bénéficiera toujours, même au-delà de la mort, de ce qu'il a tiré de sa complicité avec le vieillard. Et c'est comme ça, me semble-t-il, que la vieillesse comme la jeunesse peuvent constamment s'opposer à l'adulte, le désorienter, lui faire perdre ses normes. C'est cette connaissance des extrêmes, de la subversion, qui leur donne des armes contre l'oppression de l'adulte.

That's all, folks! vendredi, on blablate de W, comme... Waf!

3 commentaires:

  1. Et le vieux méchant? ^^ En lisant le vieux et l'enfant, ça m'a fait penser "c'est comme nos amis à poils, tiens!" ça parlera peut-être de ça le "Waf"? :)
    Super chouette comme toujours!

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    1. Tiens! c'est vrai que je n'ai pas parlé des vieilles sorcières et vieux grincheux!

      oui c'est pour la prochaine fois ;)

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  2. ... et sur le sujet, il y a le prix Chronos de littérature qui rassemble des ouvrages sur la question des personnes âgées malades // du regard de la société, des familles, etc. sur la vieillesse.
    Voir leur site : http://www.prix-chronos.org
    Il y a de très beaux titres ^^

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