mardi 27 mai 2014

Recherche titre désespérément

Chèr/es petit/es anges qui lisez ce blog,

J'ai besoin de vous! 

Et pas seulement moi!



Voyez-vous, Tibo Bérard et moi-même, ainsi qu'une splendidissime illustratrice dont je ne sais pas si je peux déjà révéler le nom donc je vais le garder pour moi pour le moment, avons dans nos poches un petit bouquin absolument pépixien pour enfants de gabarit CE-CM, aimant l'aventure, l'humour et les voitures volantes, et qui devrait sortir début 2015. 

Tout est parfait, me direz-vous! Sauf que nous n'avons PAS DE TITRE.

NO TITLE!

Et ça urge là. 

Aussi avons-nous décidé de faire appel à vos resplendissantes lumières!

avec quoi à la clef si votre titre est choisi? eh bien, c'est au choix:
  • un exemplaire du livre à sa sortie
  • un dessin de poireau par moi-même, avec la main gauche et les yeux bandés
  • une photo (assez floue) de Tibo en maillot de bain
  • une vidéo de moi en train de réciter l'alphabet grec en moins de quinze secondes (j'ai gagné un concours de vitesse de récitation d'alphabet grec quand j'étais en première OUI MADAME)
Il nous faut un titre qui corresponde à ces critères particuliers:
  • fun et punchy 
  • qui attrape et piège inexorablement l'attention des jeunes humains entre 7 et 11 ans, et ne répugne pas totalement à leurs adultes domestiques


Mais de quoi s'agit-il??? vous entends-je marmonner. Je peux pas te trouver de titre si tu me dis pas de quoi ça parle!!!

Bon, je ne vais pas vous raconter toute l'histoire, ce serait très neuneu de ma part, mais voici quelques éléments importants:
  • Il y a un ange de 10 ans qui conduit une bagnole volante un peu pourrie!
  • Il y a une vieille d(âme) de 93 ans qui voudrait bien savoir qui l'a envoyée de vie à trépas!
  • Il y a le paradis, l'enfer, le purgatoire, des démons, des diablotins, des anges, des archanges, un cyclone, des muses, des pythies, des diables à moto...!
  • Il y a un mystère à résoudre, des gendarmes du ciel à éviter, et des courses-poursuites infernales!
  • C'est drôle, plein d'aventure, et ça va très vite!
ALORS???

Notre seul titre actuel est "Mission Infernale", et on fera avec si vous ne trouvez pas mieux. Mais je suis sûre que vous trouverez mieux. Sinon je serai tellement déçue que je vous ferai la tête comme ça. 


Ca fait peur hein? Allez, lâchez vos comm'!

Bises d'encouragements et mercis d'avance,

Clem

mercredi 21 mai 2014

Ecrire pour la jeunesse en France et en Angleterre

Je passe la moitié de mon existence à me plaindre de la difficulté d'être auteur jeunesse en France, et l'autre moitié à me plaindre de la difficulté d'être auteur jeunesse en Angleterre. Heureusement, ça veut dire que je passe aussi la moitié de mon existence à encenser le système français, et l'autre moitié à encenser le système anglo-saxon.

Plusieurs personnes m'ont demandé d'écrire un billet de blog sur les différences entre l'écriture et la publication de livres jeunesse en France et au Royaume-Uni, sans doute dans l'espoir de me faire taire vu que j'en parle à tout le monde en poussant de longs hurlements dès que l'occasion se présente. Il est vrai que les deux systèmes et les deux marchés sont très dissemblables et pour quelqu'un qui essaie d'écrire pour les deux, c'est un exercice un peu délicat.



Voilà pourquoi, entre autres:

Le côté littéraire et le côté commercial

Ecrire en anglais pour le marché anglo-saxon requiert, personnellement en tous cas, un compromis entre la dimension littéraire et la dimension commerciale de mes livres. Evidemment, en France aussi, il faut qu'un bouquin se vende - mais côté français je n'ai jamais eu de discussion sérieuse avec un éditeur pour rendre mes bouquins 'plus commerciaux'. Au Royaume-Uni, il faut vraiment qu'un livre attire le plus grand nombre de lecteurs possibles.

C'est en partie parce que quand on écrit pour le marché anglo-saxon, on écrit, potentiellement, pour tous les anglophones du monde, et aussi beaucoup d'autres pays. On nous demande de faire en sorte que le livre plaise non seulement aux petits Britanniques, mais aussi aux Américains, aux Australiens, aux Sudafricains, et aux Allemands, aux Espagnols, aux Coréens et aux Turcs.

Les cessions de droits à l'étranger sont donc extrêmement importantes et il va de soi qu'un livre publié en Angleterre sera traduit autre part. En France, pour la plupart des auteurs, les ventes à l'étranger sont un heureux bonus, mais pas une attente.


étude comparative des réactions anglaise et française à la vente de droits à l'étranger

Questions de blé

Du coup, les quantités d'argent que l'on gagne sont extrêmement différentes. Les gens ne me croient pas toujours, mais la différence entre une avance en France et une avance au Royaume-Uni pour une auteur comme moi est, littéralement, de 1 à 10. Etre auteur à plein temps au Royaume-Uni est donc quand même beaucoup plus confortable financièrement qu'en France, même si ça reste très difficile de gagner un salaire décent.

Il y a d'autres différences cruciales. Au Royaume-Uni, quand on n'en est plus à son premier livre, on reçoit généralement une avance avant d'avoir fini d'écrire son bouquin. Evidemment, c'est rarement le cas en France, où on vend la plupart du temps le bouquin après l'avoir écrit, quitte à se faire envoyer bouler par ses éditeurs.

'Fidélité' aux éditeurs

En France, à part chez l'école des loisirs qui pratique une monogamie assez forcenée, on a tendance à papillonner entre différents éditeurs - surtout si l'on publie, comme beaucoup d'auteurs jeunesse, de très nombreux livres par an. Ici, au Royaume-Uni, il est assez mal vu de n'être pas 'fidèle' à une seule maison d'édition.

auteur française flirtant avec des tas d'éditeurs


L'agent littéraire

Pour moi, c'est la différence principale entre être publié en France et au Royaume-Uni. En France, les agents littéraires, en gros, n'existent pas - de temps à autre on voit un article qui dit CA Y EST ILS ARRIVENT et en fait non. Du coup, on se bat avec les éditeurs pour négocier droits, avances et clauses compliquées.

En Anglicheland, la possibilité d'avoir un agent littéraire est un rêve absolu, du moins pour moi. C'est un intermédiaire extraordinaire entre éditeur et auteur, avec des connaissances dans tous les domaines qu'il faut - notamment en droit - et c'est aussi un soutien psychologique non négligeable.

Contenu politique et idéologique

La littérature jeunesse française, ce n'est pas un secret, est beaucoup plus radicale. Beaucoup plus hot, beaucoup plus politiquement incorrecte, beaucoup plus politiquement engagée, et avec beaucoup moins de tabous. Du coup, mes livres français, surtout pour ados, sont invendables au Royaume-Uni, parce qu'il faudrait les réécrire... pour adultes.

Ce n'est pas forcément parce que les éditeurs sont des grosses chochottes, mais parce que les maisons d'éditions sont terrifiées par la possibilité de 'restreindre leur marché'. Les médiateurs du livre jeunesse au Royaume-Uni peuvent facilement boycotter, blacklister ou cesser de soutenir un auteur. Les maisons d'éditions évitent à tout prix de se mettre ces gens-là à dos, et ça veut dire qu'ils contrôlent très fermement le contenu idéologique de leurs bouquins.

'Branding' et publicité

Au Royaume-Uni, le 'branding' est très important: un auteur a une 'image', et il faut y adhérer. Ca veut dire que c'est beaucoup plus difficile de changer de genre, ou de tranche d'âge. Il faut aussi promouvoir ses livres très activement, car les éditeurs s'y attendent et peuvent décider de ne pas continuer à vous prendre vos bouquins si vous êtes une flemmarde sur Twitter.

Evidemment, en France, la littérature jeunesse est un tout petit monde: c'est assez facile de s'y faire connaître, au moins de nom, et surtout maintenant grâce aux blogs et à Facebook. Au Royaume-Uni, être publié pour la première fois est une expérience absolument terrifiante: on est personne au milieu d'une foule d'anglophones du monde entier.



D'un autre côté, les anglo-saxons font grand cas des auteurs débutants. On a un communiqué de presse dans les magazines professionnels les plus importants, une soirée de lancement, beaucoup d'attention de la part des blogs, et on est vraiment soutenu par l'éditeur, notamment pour participer à des événements. On est briefé par le département de la publicité de la maison d'édition. En France, euh... moins, quoi.

En résumé...

La situation n'est idéale ni dans un cas ni dans l'autre, mais elle n'est pas non plus atroce dans les deux. Pour l'instant, je m'en accommode pas mal: j'adore le fait qu'en France (surtout avec Sarbacane) je peux écrire plus ou moins ce que je veux, mais j'adore le fait qu'au Royaume-Uni, mes livres sont lus par un lectorat plus large, et que l'éditeur cherche toujours à en vendre plus, notamment à l'étranger. Et puis le fait d'être beaucoup mieux payé est quand même extrêmement confortable. Mais le confort a un prix: un compromis constant entre le littéraire et le commercial.

Bref, je continue (ou du moins, j'essaie de continuer) à écrire des deux côtés de la Manche, et jusqu'ici ça m'a apporté plus de joies que de chagrins.