lundi 3 mai 2010

De la cruauté en littérature jeunesse

Parmi mes dix mille bouquins commencés qui dorment dans mon ordinateur et que je réveille de temps en temps avant de les lâcher comme des vieilles croûtes quand je m'aperçois que c'est finalement super nul, il y a un bouquin pour enfants extrêmement cruel et très gore.

La cruauté dans les livres pour enfants, personnellement, j'adorais ça quand j'étais petite. Et je ne parle pas des livres d'horreur type Chair de Poule, qui faisaient simplement peur - non, je parle d'une sorte de cruauté plus humour noir, plus dérangeante. Roald Dahl est l'un des maîtres en la matière, avec Neil Gaiman, et quelques autres. Petite, j'adorais La potion magique de Georges Bouillon, avec son idée complètement amorale de vengeance physique sur une grand-mère tyrannique. Je pense qu'il y a une dimension libératrice dans toute histoire cruelle destinée aux enfants. Ils veulent tester les limites du genre - jusqu'où peut-on aller? Que peut-on montrer? Existe-t-il une cruauté intolérable en littérature?

Un autre livre de Roald Dahl très cruel: Sacrées Sorcières. Là, c'est une autre histoire, et pour moi un exemple personnel de cruauté poussée trop loin. Le héros, à la fin de l'histoire, est transformé en souris par les sorcières.



Cette fin, je m'en souviens très bien, m'avait traumatisée à neuf ans. Il n'y a aucun espoir pour que le héros s'en sorte, et en plus il semble se féliciter de son sort, qui lui promet au moins de mourir plus ou moins en même temps que sa grand-mère, à laquelle il n'envisage pas de toute façon de survivre. Ce dialogue final m'avait laissé une impression malsaine. J'avais trouvé, pour la première fois, je crois, qu'un auteur allait trop loin dans la cruauté envers ses personnages.

Mais pour en revenir à mon manuscrit, après trois chapitres l'histoire devient tellement cruelle que je me demande si ce n'est pas, en réalité, de la littérature pour adultes. La frontière est tellement mince. Toute la cruauté, bien entendu, est extrêmement imagée, voire imaginée. Comme dans les contes de fées, elle a un côté irréel et magique. Mais jusqu'à quel degré de violence peut-on aller dans un livre pour enfants? Quand franchit-on la limite entre saine libération et traumatisme? Comment savoir si tel enfant le prendra bien, et tel autre mal?

4 commentaires:

  1. Je me pose parfois ce genre de questions avant ou pendant l'écriture, au sujet de la cruauté, de la violence, oui, mais aussi du réalisme d'une situation, de l'âpreté d'un sujet ou tout simplement de l'intérêt de ce que je scribouille. En fait, je me pose 3000 questions sur 3000 sujets,mais je trouve que ces questions st souvent des empêcheuses d'écrire, car nul n'a la réponse, sauf à se confronter aux retours après publication. Alors je les repousse le plus loin possible, j'érige un solide barrage, et j'écris !

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  2. Agnès, princesse de la sagesse.
    J'adore.

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  3. Je crois que c'est impossible de savoir ; j'ai lu des trucs assez ignobles quand j'étais petite, plein de monstres ou de misère sociale, mais le bouquin qui m'a vraiment traumatisée est un 123 J'aime Lire, sur Julien un petit garçon qui ne peut pas dormir parce qu'il a peut des ombres. Les ombres sont ce que nous appelons ombres, mais dans sa tête elles se transforment en monstres grossiers, des espèces de masses grisâtres avec des dents. Il va dormir avec son frère qui se met à avoir peur, et le texte dit que tout est bien qui se finit bien quand ils vont dormir avec leur parents... mais le dessin montre une ombre qui sort dessous le lit... argggggh.
    Je ne pouvais pas lire ce bouquin, et je l'ai retrouvé il y a deux trois ans (ma mère l'avait caché), et je te jure que je n'ai pas réussi à le lire tellement la terreur que j'avais en le lisant est remontée.

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  4. Curieux j'ai lu ce livre très jeune et il en m'a jamais fait cet effet, je l'adorais d'ailleurs je l'ai lu et relu plusieurs fois et d'ailleurs il est toujours dans la bibliothèque de ma mère. Je pense que nous avons tous une sensibilité différentes, et il y a des gens qui aime se faire peur et puis il ya aussi le degrés de maturité, de décalage que peut avoir l'enfant. Du coup je dirais que c'est au parent d'essayer de connaître son enfant afin de lui proposer des lectures qu'il est capable d'apprécier. Bin évidemment je n'ai aps dit que c'était facile lol :)

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